Cave Canem

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Le Chien des Baskerville occupe une place paradoxale dans l’oeuvre de Conan Doyle et en fait à l’intérieur du genre policier dans son ensemble. C’est sans doute la plus connue, la plus abondamment rééditée et commentée de toutes les aventures de Sherlock Holmes, sans parler des innombrables adaptations dont elle a fait l’objet sous toutes les formes possibles (cinéma bien sûr, mais aussi théâtre, bandes dessinées, dessins animés, etc) On peut même parier sans prendre trop de risques qu’il s’agit du roman policier le plus célèbre de tous les temps, à égalité au moins avec Dix Petits Nègres d’Agatha Christie. Ce n’est pas mal du tout pour un livre écrit en 1901 et l’on pourrait croire assurée sa place au Panthéon de la littérature policière; or il n’en est rien.

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Car ce Chien a ses nombreux critiques qui, tout en reconnaissant ses qualités difficilement contestables d’écriture et d’atmosphère, lui reprochent pêle-mêle une construction à leurs yeux faiblarde et une intrigue trop transparente. De fait le livre, malgré sa popularité jamais démentie, n’arrive qu’en 32ème position sur la liste des « Meilleurs romans policiers de tous les temps » compilée en 1990 par la Crime Writers Association britannique (on n’est jamais si bien trahi que par les siens) et, outrage suprême, l’écrivain déconstructionniste Pierre Bayard a été jusqu’à proposer une solution alternative que certains ont jugé plus convaincante que l’originale!

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Il est certain que comparé à d’autres classiques du genre, souvent postérieurs, Le Chien des Baskervilles n’est pas la mécanique de précision que nous avons appris à attendre d’un chef-d’oeuvre du roman policier, qui plus est britannique. L’identité du meurtrier en particulier ne fait guère de mystère. On peut remarquer aussi des invraisemblances ici ou là. Enfin, péché mortel aux yeux des fans, Holmes n’est guère présent pendant l’essentiel de l’action. Tout cela, nul ne le dispute, mais – comment le dire autrement? – on s’en fout.

Le Chien des Baskerville est un roman policier, et dans « roman policier » il y a certes « policier » mais il y a aussi « roman » et il doit donc aussi être jugé comme tel. Or, Le Chien est un roman formidable, plein de suspense, de morceaux de bravoure, de personnages et de dialogues mémorables, et qui se lit et relit avec passion et ce quel que soit l’âge du lecteur. C’est probablement la seule aventure de Holmes que Doyle ait vraiment pris plaisir à écrire et cela se voit et se sent car son plaisir est communicatif. En tant qu’intrigue purement policière, Le Chien est perfectible mais comme création romanesque il côtoie une perfection où je ne lui trouve que La Pierre de Lune pour rival.

J’ai regretté plusieurs fois sur ce blog que la critique moderne méprise souvent l’intrigue ou du moins n’y voyait pas un critère fondamental, et de ce fait boude le roman policier classique dont c’est l’épine dorsale, et je le regrette toujours – mais je pense également qu’il ne faut pas donner dans l’excès inverse et condamner aux ténèbres extérieures tout roman qui a le malheur de ne pas être aussi astucieux qu’on le souhaiterait. Le Chien des Baskerville n’est pas Dix Petits Nègres, nous sommes tous d’accord sur ce point, mais il n’en figure pas moins dans le peloton de tête des meilleurs romans policiers jamais écrits.

Na.

15226164491The Hound of the Baskervilles is a paradoxical entry in Conan Doyle’s oeuvre and indeed in the whole detective fiction genre. It probably the most famous, most popular, most frequently reprinted and commented of all the Sherlock Holmes stories, not to mention the countless adaptations in every media known to man (movies, plays, graphic novels, cartoons, etc) It may even be argued without much exaggeration that it is the most famous crime novel ever written, tied with Agatha Christie’s And Then There Were None. Not bad at all for a book first published in 1901, and one might think its place in the Pantheon of the genre is secure. The problem is, it is not.

For this Hound has always had and still has its critics who, while recognizing its undoubtable litterary and atmospheric virtues, bemoan among other things a poor construction and a painfully obvious plot. That might explain why the book despite its enduring popularity only made it to No. 32 on the Top 100 Crime Novels of All Time compiled by the CWA back in 1990. What’s more, French deconstructionist writer Pierre Bayard went so far as to write a book challenging Doyle/Holmes’ solution to the case and submitting another of his own that some sacrilegious readers found more convincing! 51YqXfgRjRL

There’s no denying that The Hound when compared to some other crime fiction classics, most of them later works, doesn’t exhibit the sound, bulletproof plotting we’ve come to expect from a masterpiece of the genre, especially one from British origin. The identity of the murderer in particular will fool no one and probably never did. Verisimilitude also suffers some blows here and there. Finally and perhaps most crucially to the fan, Holmes takes a backseat for most of the book. None of this can be denied but – pardon my French – no one gives a damn.

The Hound is a detective novel, which means that it is about a detective but also that it is a novel, and it must also be judged as such – and what a novel it is! Suspensful, unputdownable, full with bravura scenes and memorable characters and dialogue, it reads and rereads with the same passion no matter how old the reader is. It was probably the only Holmes story Doyle took genuine pleasure writing and it feels. As a piece of pure plotting The Hound has its masters but as a literary work it achieves a perfection only matched in the genre by The Moonstone.

I’ve frequently bemoaned here the sad habit of modern crime fiction reviewers to treat plotting like something perfunctory or secondary even though it’s a fundational element of the genre, and I haven’t changed my mind about it. Still, I also think we shouldn’t be too purist either and condemn an otherwise wonderful book just because its plotting isn’t as watertight as we’d wish it would be. The Hound of the Baskervilles is nothing like And Then There Were None that’s for sure but it is nevertheless one of the best detective novels ever written.

Prove me wrong.

2 commentaires sur “Cave Canem

  1. Quand je lis un livre, le seul critère est de savoir si je l’ai apprécié.
    Je suis le moins préoccupé par des facteurs comme l’intrigue, la caractérisation, etc. J’ai énormément apprécié « Le Chien des Baskerville »

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